Pour les travailleurs qui sont en contact direct avec le public, la gestion des émotions est un défi important. Plusieurs de leurs clients ne traitent pas les enseignants, infirmiers, policiers ou serveurs avec beaucoup de respect, si bien qu’il devient difficile pour eux de maintenir le même niveau de courtoisie ou de professionnalisme avec tous. Plusieurs études ont déjà démontré que les interventions qui visent une meilleure gestion des émotions aident dans la prévention de l’épuisement professionnel et la rétention, mais font-elles aussi une différence quant à leur performance? Les européens Hülsheger, Lang, Schewe et Zijlstra l’ont étudié d’une manière originale dans un article qui a été publié dans le Journal of Applied Psychology.
Ils ont obtenu la participation de 41 coiffeurs allemands qui ont tenu un journal pendant 10 jours où ils relataient la gestion de leurs émotions ainsi que les pourboires que leurs clients leur laissaient. La moitié des coiffeurs avaient aussi à étudier un fascicule qui enseignait la gestion des émotions, soit trois approches cognitives pour remettre en contexte les émotions vécues et une autre pour susciter des émotions positives (deep acting). Ils ont trouvé que ceux qui ont reçu les fascicules d’auto-formation recevaient plus de pourboires que ceux qui ne l’avaient pas reçu. Dans ce groupe qui a été formé, il y avait une différence entre ceux qui ont rapporté mettre en pratique la formation jamais ou rarement, dont les pourboires étaient semblables à ceux du groupe contrôle, et ceux qui l’ont mise en pratique qui rapportaient des pourboires de 1,5 Euro de plus par client. On peut donc conclure que l’intervention a eu un impact causal sur la performance au travail de ces travailleurs.
J’ai souvent l’impression que le paradigme dominant dans la gestion est que les émotions, comme la santé ou la famille, font partie de la vie privée du travailleur et ne devraient pas être abordées par les patrons. Des recherches comme celles-ci montrent au contraire que les émotions sont non seulement un indicateur de l’expérience du travailleur, mais aussi un déterminant de sa performance au travail, comme les compétences techniques. Il est peut-être temps de mieux outiller les travailleurs – patrons comme employés – dans la gestion des émotions au travail.
Sur cette question, l'auteur de ce blog va imiter les universitaires qui l'inspirent tant et prendre une pause pour l'été. Les journaux scientifiques ne chômeront toutefois pas, et on se revoit à la rentrée avec de nouvelles recherches passionnantes!
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