Beaucoup a été dit au cours des dernières semaines à propos du débat qui a eu lieu à l’Université d’Ottawa sur la pertinence d’utiliser un mot raciste pour parler des personnes noires. Je ne veux pas discuter ici du contenu du débat, mais plutôt de la manière de le mener. On veut que les milieux de travail reflètent la composition de la société, ce qui implique que des gens avec des perspectives différentes le fréquentent, mais aussi qu’ils soient harmonieux, donc que les gens qui y passent leurs journées puissent collaborer malgré ces différences. Or, cette tendance à se draper dans des principes (créer un environnement propice au bien-être des membres de minorités versus promouvoir la liberté de parole, dans le cas de l’Université d’Ottawa) et de dénoncer ceux qui ne sont pas d’accord avec soi représente une difficulté pour les leaders des organisations. Plusieurs remarquent en effet une augmentation des conflits et des plaintes de harcèlement. Comment permettre aux gens de collaborer même s’ils ont des points de vue différents? Yeomans, Minson, Collins, Chen et Gino ont publié un article dans Organizational Behavior and Human Decision Processes qui offre un début de solution.
Les auteurs ont cherché à définir un nouveau concept, la réceptivité aux conversations. Dans une première étude, ils ont cherché à comprendre ce qui fait qu’on perçoit qu’une personne est réceptive aux arguments de l’autre et ils ont entraîné un ordinateur à reconnaître les signaux verbaux de réceptivité. Puis ils ont mené deux autres études qui ont montré l’impact de se montrer réceptif. Ils ont notamment trouvé que cela permet de développer de meilleures relations de confiance et d’éviter que les autres nous envoient des attaques personnelles. Fait intéressant, ils ont trouvé que la réceptivité décodée par l’ordinateur était corrélée avec la perception de l’autre, mais pas avec l’auto-évaluation de la réceptivité, ce qui montre qu’on est mauvais juge de sa propre réceptivité. Finalement, dans une dernière étude, ils ont montré qu’en enseignant aux gens à être réceptifs, ils leur permettaient de mieux collaborer avec les autres et, étonnamment, de fournir des arguments plus persuasifs pour les convaincre.
Peut-être que les conflits qui déchirent les sociétés occidentales montrent qu’on n’a pas assez pris le temps de montrer aux gens comment converser. Des principes simples comme de formuler des arguments positifs plutôt que négatifs, de montrer qu’on comprend le point de vue de l’autre, de trouver des points d’accord et de modérer ses affirmations semblent effectivement trop absents des débats publics, mais aussi de bien des conflits au travail. Se peut-il que la solution à l’augmentation des conflits au travail soit d’enseigner aux gens à converser d’une manière plus constructive?
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